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DIA : définition, obligations et erreurs à éviter pour sécuriser vos ventes

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11/12/2025
Sommaire
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La déclaration d’intention d’aliéner (DIA) est une étape clé de la vente lorsqu’un bien est situé dans un périmètre soumis à un droit de préemption public qui se déclenche par déclaration préalable (DPU, ZAD, ENS, PENAP, recul du trait de côte, etc.).

Souvent perçue comme un simple formulaire à transmettre, elle conditionne pourtant :

  • la sécurité juridique de la vente,
  • la régularité de la purge,
  • et, en pratique, la responsabilité du notaire.

Tous les droits de préemption ne passent cependant pas par une « DIA » au sens strict : certains se purgent par déclaration préalable de cession (fonds de commerce), d’autres par notification / offre de vente (locataires d’habitation, preneur rural, indivisaires, etc.).

La DIA : à quoi sert-elle ?

Pour les droits de préemption qui renvoient à l’article L. 213-2 du Code de l’urbanisme ou à des régimes analogues (ENS, PENAP, recul du trait de côte…), la DIA permet au titulaire du droit :

  • d’être informé du projet d’aliénation,
  • d’apprécier la nature du bien et les conditions de la vente,
  • de décider d’exercer ou non son droit (préempter, renoncer, proposer un prix différent).

Pour ces droits, toute aliénation visée par les textes est subordonnée, à peine de nullité, à une déclaration préalable :

  • DPU / ZAD / périmètres provisoires : C. urb., art. L. 213-2, L. 213-1 ;
  • ENS : C. urb., art. L. 215-14 ;
  • Recul du trait de côte : C. urb., art. L. 219-6 ;
  • PENAP : renvoi au mécanisme de DIA, avec exercice le plus souvent par le département et/ou la SAFER.

Quels droits de préemption sont (notamment) purgés via une DIA ?

1. Les droits « classiques » d’urbanisme et d’environnement

Ces droits supposent une DIA adressée à la collectivité ou au département :

  • Droit de préemption urbain (DPU simple / renforcé)

(C. urb., art. L. 211-1 et s., L. 213-1 et s.)

  • Droit de préemption en zone d’aménagement différé (ZAD)

Procédure alignée sur le DPU : mêmes articles L. 213-1 et s.

  • Espaces naturels sensibles (ENS)

DIA adressée au département, titulaire du droit (C. urb., art. L. 113-8 et L. 215-14)

  • Espaces naturels, agricoles et périurbains (ENAP)

Périmètres de protection institués au profit du département, avec droit de préemption exercé, en pratique, par la SAFER ou un EPF, sur la base d’une DIA.

  • Droit de préemption pour l’adaptation au recul du trait de côte.

Droit spécifique sur certaines communes littorales, déclenché par déclaration préalable, à peine de nullité (C. urb., art. L. 219-1 et L. 219-6).

À ces droits s’ajoutent d’autres préemptions publiques à base environnementale (ressource en eau, captages, etc.), également structurées autour d’une déclaration préalable assimilable, dans la pratique notariale, à une DIA.

2. La SAFER : une DIA, mais sous un régime propre

La SAFER repose aussi sur une « déclaration d’intention d’aliéner » (DIA SAFER), mais sous le régime du Code rural (C. rur., art. L. 143-1 et s.). La déclaration n’est pas celle de l’article L. 213-2 du Code de l’urbanisme, même si, côté notaire, l’usage du terme « DIA » est courant dans les deux cas.

Et les autres droits de préemption… sans DIA ?

D’autres droits doivent être purgés, mais ne passent pas par une DIA au sens urbanisme :

  • Droit de préemption du preneur rural

Exercice dans les conditions du bail rural (C. rur., art. L. 412-1 et s.), par notification et offre de vente.

  • Droits de préemption du locataire d’habitation

Loi du 6 juillet 1989 et loi du 31 décembre 1975 (ventes après division, ventes en bloc…) : purge par notification d’une offre de vente au locataire, à peine de nullité de la cession.

  • Droit de préemption sur les fonds de commerce et baux commerciaux

Le droit de préemption commercial (C. urb., art. L. 214-1 et s.) utilise une déclaration préalable de cession à la commune, distincte de la DIA « urbanisme », même si, localement, les formulaires peuvent y ressembler.

En pratique, pour le notaire, l’enjeu est donc de distinguer :

Quels droits se purgent par DIA (au sens déclaration préalable urbanisme / environnement) ?

Quels droits se purgent par notification / offre de vente ou formulaire spécifique ?

Articulation des droits de préemption en cas de cumul

Lorsqu’un même bien est concerné par plusieurs droits, ils ne s’appliquent pas tous au même rang. Il n’existe pas une hiérarchie générale couvrant tous les droits, mais des règles de priorité sectorielles :

Quelques exemples utiles pour la pratique notariale

  • Sur le littoral :
    • le droit de préemption ENS prime sur le droit lié au recul du trait de côte ;
    • le droit de préemption « recul du trait de côte » prime, lui, sur le DPU, la ZAD, le droit de préemption commercial et le droit de préemption de la SAFER.
  • En zone agricole :
    • le preneur rural en place dispose, dans de nombreux cas, d’un droit de préemption prioritaire sur celui de la SAFER (C. rur., art. L. 412-8, L. 143-6).
  • Entre DPU et ZAD :
    • à l’intérieur d’une ZAD, les terrains ne sont plus soumis au DPU (C. urb., art. L. 212-2-1), le droit de préemption « ZAD » prenant le relais.

En dehors de ces cas expressément réglés, aucun texte ne pose une hiérarchie générale entre tous les droits. La pratique sécurisée consiste alors, pour le notaire :

  1. à identifier l’ensemble des droits susceptibles de s’appliquer,
  2. à vérifier, pour chacun, s’il existe une règle spéciale de priorité,
  3. à purger chaque droit selon sa propre procédure (DIA, déclaration préalable, notification) lorsqu’aucune priorité claire n’est prévue.

Quand doit-on déposer une DIA ?

Pour les droits relevant des régimes « DIA » (DPU, ZAD, ENS, ENAP, recul du trait de côte, etc.) :

  • la DIA doit être déposée avant la conclusion de la vente (avant l’acte authentique constatant le transfert de propriété),
  • à défaut, l’aliénation est nulle sur le fondement des textes applicables (C. urb., art. L. 213-2 ; L. 215-14 ; L. 219-6).

Exception : droit non opposable faute de publicité de l’acte instituteur

Lorsque l’acte instituant le droit de préemption n’a pas été régulièrement publié avant que la vente ne devienne parfaite, le droit de préemption est inopposable au vendeur : la DIA n’est alors pas exigible. La jurisprudence l’a admis, notamment pour le DPU.

Cas particulier : unité foncière partiellement incluse dans un périmètre de préemption

Il est fréquent qu’une unité foncière soit :

  • en partie située dans un périmètre de préemption,
  • et en partie hors périmètre.

Principe : la DIA porte sur l’ensemble de l’unité foncière

Pour le DPU et les régimes analogues, la DIA doit, en principe, porter sur l’ensemble de l’unité foncière mise en vente, même si seul un morceau est effectivement situé dans la zone soumise au droit.

Si le titulaire décide de préempter seulement la fraction située dans le périmètre, le propriétaire peut :

  • renoncer à la vente,
  • accepter la préemption partielle,
  • contester le prix proposé,
  • exiger l’acquisition de l’ensemble de l’unité foncière (réquisition d’emprise totale dans les conditions prévues par le Code de l’urbanisme).

Que doit contenir une DIA ?

Les textes (C. urb., art. L. 213-2, R. 213-5 ; dispositions équivalentes pour ENS, trait de côte, etc.) imposent un certain nombre de mentions :

  • identité du propriétaire (vendeur) et, lorsqu’il est connu, de l’acquéreur pressenti,
  • désignation précise du bien (références cadastrales, superficie, nature et affectation),
  • prix et conditions de l’aliénation projetée (ou mise à prix en cas d’adjudication),
  • modalités particulières de paiement (éventuels paiements en nature avec estimation),
  • pièces justificatives éventuellement exigées par voie réglementaire ou par le formulaire local (diagnostics, plan, état locatif, etc.).

L’objectif est que le titulaire du droit puisse apprécier, de façon complète, l’opportunité de préempter.

Les erreurs les plus fréquentes en pratique

  • Oubli d’un droit de préemption applicable

DPU renforcé, ZAD, ENS, ENAP, SAFER, recul du trait de côte, droits liés à l’eau, etc.

  • Se fier uniquement au certificat d’urbanisme

Le certificat d’urbanisme doit indiquer l’existence de droits de préemption (C. urb., art. R. 410-15), mais il n’est pas exhaustif ni figé dans le temps : des droits peuvent être créés ou modifiés après son établissement.

  • Mauvais destinataire ou mauvais formulaire
    1. DIA urbanisme : mairie ou EPCI compétent / titulaire.
    2. DIA ENS : département.
    3. DIA SAFER : SAFER territorialement compétente.
    4. Déclaration préalable DPC : commune.
  • Délais mal calculés ou mal suivis

Délai de deux mois pour DPU/ZAD ; trois mois pour ENS avec délais propres aux titulaires successifs ; variantes pour le trait de côte.

  • Confusion autour de l’unité foncière
    • DIA limitée à une seule parcelle alors que l’unité foncière en comprend plusieurs ;
    • ou, inversement, DIA portant sur plusieurs unités foncières alors que toutes ne sont pas soumises au droit de préemption, ce qui complique la régularité de la décision de préempter.

Sanctions en cas d’erreur et responsabilité du notaire

Nullité de la vente

Pour les droits de préemption fondés sur une DIA (DPU, ZAD, ENS, trait de côte, etc.), toute aliénation effectuée sans déclaration préalable régulière est nulle, sur le fondement des textes qui organisent la procédure (C. urb., art. L. 213-2 ; L. 215-14 ; L. 219-6, etc.).

La nullité est en principe :

  • invocable par ce dernier dans un délai de 5 ans à compter de la publication de l’acte (C. urb., art. L. 213-2, al. fin).

Le titulaire ne peut pas obtenir l’attribution forcée du bien, mais il peut :

  • faire annuler la vente,
  • et, le cas échéant, engager la responsabilité du notaire.

Responsabilité du notaire

Le notaire peut voir sa responsabilité engagée en cas :

  • d’oubli d’un droit de préemption,
  • de défaut de dépôt de DIA alors qu’elle s’imposait,
  • d’envoi à un mauvais titulaire,
  • de DIA matériellement incomplète ou inexacte,
  • de suivi défaillant des délais, conduisant à une décision irrégulière ou à une absence de purge.

La jurisprudence retient assez facilement la faute notariale en cas d’annulation de la vente pour absence de DIA, avec réparation du préjudice du vendeur et/ou de l’acquéreur évincé.

Le rôle central du notaire dans la gestion de la DIA

Le notaire se trouve au cœur du dispositif :

  • Conseil & expertise

Identification de tous les droits de préemption, lecture critique du CU, analyse des périmètres, qualification des situations (vente isolée, ensemble de lots, unité foncière, zone littorale, zone ENS, etc.).

  • Conformité des formalités

Choix du bon canal (télédéclaration, dépôt papier, plateforme dédiée), vérification des destinataires, complétude des mentions obligatoires.

  • Sécurisation de la vente

Suivi rigoureux des délais, conservation des preuves de dépôt et de notification, vérification de la régularité des décisions de préempter ou de renoncer.

Conclusion

La DIA n’est pas qu’un document administratif : c’est un acte à forte technicité, au cœur de la purge des droits de préemption et de la sécurité de la vente.

Dans un contexte où les périmètres se multiplient et les pratiques varient selon les collectivités, la rigueur est indispensable pour éviter les erreurs et sécuriser les actes.

Si vous souhaitez être accompagnés dans la gestion de vos DIA ou sécuriser vos procédures de préemption, nos équipes peuvent vous aider.

Fanny Cassia
Fanny Cassia
Chargée de marketing digital
Preventimmo

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