Intégration des nouvelles recrues dans les cabinets d'avocats
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# Recrutement
12 min

Avocat : onboarding - embarquez vos nouvelles recrues

21/3/2024
April 2, 2024
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Sommaire
À la suite de son premier article sur le thème du recrutement "Avocats : quand et qui recruter ?", Emmeline Bocherel, avocate au barreau de Nantes, fondatrice et dirigeante du cabinet Tax Suits You reprend la plume pour nous parler de la suite du processus de recrutement : l'intégration ou onboarding de la nouvelle recrue.

Onboarding

Votre process de recrutement touche à son terme, vous avez trouvé le profil de vos rêves. Il ou elle a dit oui et tous les membres de votre cabinet sont aussi impatients que vous de débuter cette "lune de miel" professionnelle.

Cette fois-ci, vous n’avez pas le droit à l’erreur. Vous avez mis toutes vos billes et toute votre énergie pour ce recrutement. Il doit se passer pour le mieux. Alors, comment s’assurer que votre candidat ne fuira pas votre cabinet dès la première semaine ?

Je vous délivre aujourd’hui ma méthode pour bien recruter, bien intégrer votre nouveau profil et, si cela doit arriver, bien lui dire au revoir.

Comment réussir un recrutement en cabinet d'avocat ?

Avoir trouvé le bon profil n’est pas suffisant. La personne a beau répondre à chacun de vos critères indiqués sur la fiche de poste, a beau avoir de l’expérience sur un poste similaire les fois précédentes, il va quand même falloir l’intégrer dans votre entreprise.

L’intégration, pour moi, se découpe en deux choses :

  • S’assurer que toute l’équipe est en adéquation avec le profil recruté (pour éviter les frictions, et promis, quelle que soit la taille de la structure, et même dans les structures où règne la bienveillance, on peut parfois être surpris de certaines réactions)
  • Préparer l’intégration (ou onboarding).

 Il ne faut surtout pas l’oublier : ce n’est pas parce que vous adorez votre nouvelle recrue qu'il en est de même pour votre équipe.

J’en ai fait les frais, j’ai naïvement pensé que mes équipes ne pouvaient que me faire confiance sur mes nouveaux recrutements, ce qui a failli faire voler en éclat une équipe pourtant bien soudée.

C’est pourquoi mes recrutements ne sont déroulent plus du tout de la même manière. Si c'est moi qui reçois les CV et que je réalise toujours le premier échange téléphonique, le premier entretien physique se fait systématiquement, au moins avec ma collaboratrice.

Si la recrue doit également être amenée à travailler directement avec une ou plusieurs autres personnes de l’équipe, je m’assure que cette ou ces personnes pourront être présentes pour échanger avec le candidat.

Pourquoi ? Parce que vous n’êtes pas à l’abri de réveiller des choses au sein de votre équipe que vous ne soupçonneriez peut-être pas. Pire encore, vous pourrez vite vous apercevoir que votre candidat, assez parfait vous semble-t-il, est en réalité ingrat lorsqu’il ou elle doit répondre à d’autres membres de votre équipe.

Pour moi, une personne qui ne fait pas preuve de respect à l’égard de mon assistante ne passera plus jamais la porte du cabinet. Il en est de même si cette personne témoigne des marques d’irrespect lorsque mes collaborateurs posent une question en entretien. Et ce, même si la question posée peut paraître futile.

Et mieux encore, ce n’est pas parce que vous êtes deux sur trois à trouver le candidat parfait qu'elle ou il devra être recruté. Tout le monde doit être en capacité de partager ses ressentis à l’égard du candidat.

Tout dépend bien sûr de la taille de votre structure. Vous n’allez pas faire rencontrer à votre candidat les 80 membres de votre cabinet. Mais vous devrez sélectionner un échantillon suffisant de personnes différentes qui seront appelées à rencontrer la personne (la personne qui a géré sa candidature, votre personnel administratif, etc., plusieurs collaborateurs ou associés différents) sans que cela ne ressemble non plus à une audition libre. Ce n’est pas pour rien que dans les plus gros cabinets, vous pouvez être amené à passer 3 ou 4entretiens avec des personnes différentes, de niveaux différents. J’ai pu constater à l’inverse que celles qui passaient en dehors de ce filtre (débauchage, suivi d’un collaborateur avec son associé, recrutement trop rapide, etc.) et qui n’adhéraient pas au mode spécifique du fonctionnement du cabinet, ne restaient pas longtemps ou finissaient par dépérir.

Une fois que tous les marqueurs sont au vert, quid de l’intégration ?

L’onboarding, c’est organiser la lune de miel parfaite entre la nouvelle recrue et l’entreprise, pour éviter que le contrat liant les parties ne soit rompu trop tôt. C’est de rendre l’intégration la plus souple possible, et lorsque cela est envisageable, de l’automatiser et de la processer au maximum pour qu’elle reste la plus efficace possible.

Sauf que l’onboarding, dans un cabinet d’avocats, ça ressemble à quoi ? N’ayant pas de source sur le sujet, je suis partie de mon expérience.

Je me suis souvenue de la petite boule au ventre la veille et le matin de mes premiers jours dans mes nouvelles fonctions. Je ne savais pas si je devais amener mon déjeuner, si je devais déjeuner en extérieur, ou si j'allais déjeuner avec mes collègues. Je ne savais pas si je serais jetée dans le bain dès la 1ère heure en rendez-vous client ou avec des écritures à produire. Ou si je ferais le tour des bureaux ou si l’on m’installerait derrière mon nouveau PC et que je serai formée à l’utilisation des outils.

A propos des outils, il m’est arrivé un nombre incalculable de fois de me retrouver face à un ordinateur sans que l’on ne me donne mes mots de passe ni que l’on me confirme ce que je pouvais faire ou ne pas faire. A l’inverse, je me souvenais de véritables formations d’intégration au sein de cabinets ou entreprises dans lesquelles j’avais pu faire mes premières armes. Elles s’éternisaient et ne me permettaient pas de tout comprendre.

J’ai donc décidé de créer une procédure à la hauteur de ce que j’aurai aimé vivre.

En toute franchise, je l’ai améliorée au fur et à mesure de mes onboardings. D’ailleurs pour la petite astuce, recruter des stagiaires est la meilleure manière de tester votre process, et de l’améliorer. La version initiale était loin d’être ce qu’elle est aujourd’hui. Donnez-vous le temps de construire la solution qui vous correspond.

Je partage la mienne avec vous.

Signature, ordinateur, logiciels, accès... Tout est prêt

Au moins une semaine avant l’embauche, j’échange avec mon équipe et vois comment nous pourrons nous organiser lors des premières semaines. Y a-t-il une formation ou un évènement auquel la personne pourrait être intéressée ou qui retiendra tout ou partie de l’équipe ? Prévoit-on un déjeuner tous ensemble, ou plutôt un goûter ou un apéro ? Et à quelle date ?

On construit ainsi ensemble la première semaine de cette nouvelle recrue et ce planning lui est communiqué si possible une semaine avant son premier jour.

Je précise également qu’elle peut bien sûr amener son déjeuner et que nous avons l’habitude de déjeuner tous ensemble.

Ensuite, quelques jours avant l’arrivée, je vérifie que tout est prêt pour son arrivée : ordinateur mis à jour, logiciels téléchargés avec accès pré-enregistrés (logiciel métier, Pack Office, Notion, Canva, etc.), documents internes préparés (contrat, règlement intérieur, charte RSE, wiki en ligne, etc.), adresse e-mail créée, registre du personnel prêt à être dégainé, petit cahier de note avec crayon pour pouvoir prendre des notes les premiers jours.

Et bien sûr, je vérifie que le pack d’intégration est prêt, c'est à dire tous les documents qui devront être ou auraient dû être signés, et la promesse d’offrir à la personne toutes les clés pour pouvoir rapidement prendre son poste. Chez nous, la personne est formée dès son premier jour à tous nos outils (logiciels métier, wiki interne, formulaires permettant d’automatiser les demandes d’absence et de congés), aux enjeux en matière de secret professionnel et de cybersécurité, et surtout doit adhérer à notre Charte et à notre Règlement Intérieur.

Arrive donc le 1er jour. Nous faisons le tour des bureaux et la recrue est présentée à tout le monde. On passe ensuite à la phase « paperasse » où je lui rappelle les valeurs et engagements du cabinet, et lui laisse le temps de prendre connaissance du règlement intérieur, de l’engagement de confidentialité et de respect du secret professionnel ainsi que de la charte RSE du cabinet.

Et c’est parti pour la présentation des outils évoqués précédemment. Je lui fais une première démonstration, notamment de notre logiciel métier (enregistrement des temps, accès à notre Drive, modification de documents, etc). Et comme je sais qu’on ne peut pas se souvenir de tout, la première chose que je lui montre, c’est notre wiki interne, qui regroupe tous nos process, en format écrit ou vidéo. Et si la personne n’a aucune connaissance de Notion, j’en profite pour la former aux usages rudimentaires. Comme ça, la personne écoute, et puisqu’elle ne retiendra pas tout (on est humain, après tout), elle saura où compléter, si besoin.

Les process sont différents selon les profils. Un·e stagiaire n’aura par exemple pas besoin que je lui explique comment créer un nouveau dossier client, non plus un Community Manager, quand à l’inverse ils auront besoin respectivement que je leur montre comment utiliser nos logiciels de recherche juridique ou notre outil de planification de notre newsletter, et comment enregistrer leurs temps.

En général, l’après-midi sert à faire un tour de tous les dossiers en cours pour que la personne puisse comprendre les enjeux traités par le cabinet, le type de clientèle que l’on a, etc. C’est l’occasion également de proposer de découvrir les différents types de dossier et leur composition, selon le poste qu’occupera la nouvelle recrue. J’en profite également pour cerner les connaissances de base de mon interlocuteur, pour identifier la nécessité d’organiser une formation sur certaines bases qui lui manqueraient (contrôle et contentieux fiscal, création d’une société, enjeux de certaines clauses contractuelles, etc.)

Le reste du planning de la semaine est ensuite validé avec la nouvelle recrue.

Je rappelle bien sûr à toutes nos nouvelles recrues qu’elles auront chacune un temps d’adaptation, qui est normal et bienvenu. Et qu’elles ne doivent pas se sentir gênées pour ça.

Des premières tâches ainsi que objectifs trimestriels sont mis en place, comme ça, la personne sait tout de suite vers où elle devra concentrer ses efforts. J’évite ainsi l’anxiété de ma nouvelle recrue qui pourrait se retrouver submerger face à la montagne de tâches qu’elle pourrait estimer devoir réaliser en un temps trop court.

Nous fixons en général un premier point très rapidement, en tête à tête, en plus des réunions plus générales, pour s’assurer que tout se passe bien et lui proposer, si besoin, de revenir sur certains outils ou concepts.

Le petit plus ? J’ai mis tout ce process sur un de nos outils internes pour que toute autre personne du cabinet, qui pourrait être chargée de l’intégration d’une nouvelle recrue en mon absence, puisse suivre tout le processus. Une to-do list à plusieurs semaines.

Bien recruter, c’est essentiel. Anticiper les départs, c’est mieux.

Comme le cabinet est régulièrement amené à intégrer des personnes sur de courtes durées, je me suis vite rendu compte qu’on ne pouvait pas seulement préparer l’intégration d’une personne, il fallait aussi anticiper son départ.

Quoi de pire que d'ignorer si la personne a eu le temps de finaliser la tâche qu’elle avait débuté, de s’apercevoir qu’elle a oublié de rendre le double de clé, ou pire, ne pas retrouver tous les travaux qui avaient été finalisés mais qui n’ont pas été enregistrés dans les bons endroits.

C’est également devenu essentiel lorsque l’on a dû faire face à des départs complètement imprévus, et au pire moment possible. Et lorsque l’humain s’en mêle, il est essentiel de pouvoir revenir à du concret pour ne pas se laisser emporter par l’émotion.

Alors, de la même manière que mon tableau d’onboarding, j’ai mis en place un process d’outboarding. J’ai listé les choses pour lesquelles je voulais être sûre d’avoir toutes les informations, les délais raisonnables pour que la personne sortante ait le temps de finaliser ce que je lui demandais. Il me fallait également faciliter la sortie, en n’oubliant pas d’acheter les petits cadeaux ou de prévoir le déjeuner, apéro ou goûter de départ. Et bien sûr, préparer une liste de questions pour toujours s’améliorer et améliorer nos process.

La personne qui est amenée à quitter le cabinet peut consulter en toute autonomie le tableau d’outboarding (la version salariée, pas la version dirigeante) et peut alors bien s’y préparer.

Le process complet d’outboarding est accessible, tant pour moi que pour la personne en charge de la gestion du personnel en mon absence. Comme ça, je n’ai pas de doutes sur le fait que même en cas d'empêchement, je n’aurai pas à courir après les informations nécessaires si mon équipe a oublié de le faire.

Car il est essentiel, pour limiter les frictions émotionnelles, et pour conserver une belle marque employeur, que le départ soit aussi exceptionnel (ou doux) que l’arrivée.

Une dernière petite chose, profitez de votre « outboarding » pour demander à votre recrue comment s’est passé l’onboarding. Ça vous permettra de vous améliorer constamment.

Conclusion

La bonne intégration de ses nouvelles recrues (et leur départ) ne devrait jamais être négligée par nos cabinets d'avocats. Certains diront probablement que s’ils recrutent, c’est justement parce qu’ils n’ont pas le temps, alors comment trouver ce temps pour intégrer correctement sa nouvelle recrue ?

Mon conseil : prenez ce temps !

Vous le rentabiliserez bien plus que vous ne le pensez :

  • Votre recrue sera bien plus efficace, à ne pas perdre de temps à essayer de comprendre comment se connecter à votre logiciel métier ou à enregistrer ses temps, et n’attendra pas des jours voir des semaines pour se mettre à la page par peur de vous déranger. Et puisqu’elle connaît ses collègues, elle pourra également plus facilement poser des questions, et éviter ainsi les heures d’improductivité.  
  • Le bien-être au travail passe déjà par une bonne intégration ! Vous réduisez le stress de vos candidats sur leurs premières semaines (et vous vous assurez ainsi qu’ils resteront plus facilement) et confirmez que vous êtes un patron sain qui veut assurer leur bien-être ! Vos collègues créent des relations de confiance entre eux.
  • Vous pérennisez votre recrutement : il est toujours plus difficile de quitter un endroit où l’on sait que l’on est choyé, que l’on se sent bien, où l’on a noué des liens d’amitié et de confiance, et ce, d’autant plus face aux nouveaux candidats pour qui le bien-être et l’équilibre vie personnelle / vie professionnelle compte plus que le montant figurant sur leur bulletin de salaire.
  • Vous vous démarquez de vos concurrents qui n’en ont absolument rien à faire, et donc créez ou améliorez votre marque employeur pour faciliter vos prochains recrutements.
  • Un salarié heureux est un salarié qui recommande ou qui dit du bien de vous : ne négligez jamais le potentiel d’apport d’affaires ou de candidats de vos salariés.
  • Moins de charge mentale pour vous : le process est anticipé et carré, vous suivez votre to-do list pour ne rien oublier, et vous pouvez même déléguer tout ou partie de l’onboarding !

Je vous souhaite de bonnes intégrations !

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Vous souhaitez en savoir plus sur le recrutement ? Redécouvrez notre webinar du 29 mars "Recrutement et avocats : Où sont les collaborateurs ? "
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Emmeline Bocherel
Emmeline Bocherel
Avocate dirigeante
Tax Suits You

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